Si la colonisation a fait des ravages sur le plan humain, éthique et culturel, la décolonisation a été lourde de conséquences, partout dans le monde. L’une des principales causes des conflits actuels est le tracé des frontières, effectué par les colons avant leur retraite. Au Pakistan, c’est le cas pour toutes les provinces du pays ou presque. En 1947, au retrait des Anglais, il est finalement décidé, après moultes discussions et manifestations, de séparer l’ancien Empire Britannique en deux états distincts : L’Inde, à majorité hindoue, et le Pakistan, nouveau pays créé pour les musulmans, qui se déploiera sur les provinces à majorité musulmane.
De nouvelles frontières sont donc tracées et les provinces pakistanaises créées : Khyber Pakhtunkhwa, Balochistan, Sindh, Punjab, et Bangladesh (ce dernier obtiendra son indépendance en 1971). Nous reviendrons plus tard au cas du Kashmir. Au Khyber Pakhtunkhwa, la ligne Durand, tracée par les Britanniques à leur départ, a séparé l’Afghanistan du nouveau Pakistan, coupant l’ethnie pashtoune en deux volontairement (et allant même jusqu’à couper les tribus les plus gênantes en deux pour les affaiblir). La frontière avait été tracée pour une durée de 100 ans, période à présent achevée, ce qui ravive les conflits entre Afghanistan et Pakistan. Le Punjab, grenier du pays car terre agricole, a été divisé en deux, avec d’un côté le Punjab indien et de l’autre le Punjab pakistanais. Avec la Province du Sindh mitoyenne du Rajasthan indien, il a été le plus violemment touché par les violences et les déplacements de populations au moment de la Partition en 1947, les hindous et les sikhs émigrant vers l’Inde, et les musulmans vers le Pakistan fraîchement créé. Le Balochistan, région sud-ouest du pays, est à présent partagé entre une partie pakistanaise, une partie afghane et une partie iranienne.
Depuis sa création en 1947, l’Etat pakistanais a toujours été obsédé par la préservation de ses frontières et la peur que ses voisins ne le réduisent à néant ou ne l’amputent d’une partie de son territoire. Il a toujours joué double jeu, apparaissant conciliant avec les grandes nations occidentales pour bénéficier de leur aide, notamment financière, et gardant, voire attaquant les frontières voisines par le biais des diverses branches armées de ses services secrets. La région du Kashmir (ou Cachemire), à majorité musulmane, aurait dû logiquement rejoindre le Pakistan, ainsi que toutes les régions musulmanes.
Mais malgré sa population musulmane, il s’agissait d’un état princier semi-autonome, gouverné par une dynastie hindoue, qui préféra en toute logique se rattacher à l’Inde pour s’assurer une protection. Il était en effet prévu que les états princiers fassent leur choix eux-mêmes. Le nouveau gouvernement indien fit alors des pieds et des mains pour convaincre le maharaja du Kashmir de rejoindre l’Inde, mais des troupes tribales venues du Pakistan l’obligèrent à demander l’aide militaire de l’Inde.
Ainsi naissent les problèmes au Kashmir, petit paradis terrestre. C’est le début de la première guerre indo-pakistanaise qui dure jusqu’en 1949, où l’ONU propose un cessez-le-feu, laissant à l’Inde le contrôle des deux tiers du territoire de l’État formant le Jammu-e-Kashmir, les pakistanais gardant l’Azaad Kashmir («Kashmir libre») et le Gilgit-Baltistan (ou « Territoires du Nord »). Le cessez-le-feu prévoyait également un référendum qui n’a à ce jour jamais eu lieu.
En 1965, suite au refus de l’Inde d’organiser le référendum, le Pakistan envoie au Kashmir des militaires en civil pour provoquer une révolte, et apportent leur aide aux mouvements pro-pakistanais au Kashmir indien. L’armée indienne réplique. C’est la deuxième guerre indo-pakistanaise. Le conflit fait plus de 7000 morts, et est encore une fois stoppé par une résolution de l’ONU qui oblige les troupes à se retirer de leurs côtés respectifs.
Le conflit de Kargil a lieu en 1999 après l’infiltration de soldats pakistanais en territoire indien.
Puis de nouveaux affrontements ont lieu en 2001, après que cinq hommes armés aient attaqué le parlement indien. Les troupes se positionnent et on craint alors une guerre nucléaire, les deux puissances possédant l’arme nucléaire.
Le Pakistan continue de ne pas reconnaître la frontière et de demander le référendum prévu par le cessez-le-feu de 1949, que l’Inde continue de refuser, considérant le Kashmir comme partie intégrante de son territoire.
Depuis cette date, l’armée indienne agit comme une armée d’occupation au Kashmir, commettant violences et oppression envers la population locale. En retour, les groupes séparatistes kashmiris, souvent aidés par les services secrets pakistanais, organisent les émeutes et ont souvent revendiqué des attentats en Inde.
Depuis 2014 et l’accession au pouvoir en Inde du BJP, parti pro-hindou, la situation au Kashmir devient de plus en plus tendue. Le 5 août 2019, le gouvernement indien révoque l’autonomie constitutionnelle du Kashmir. L’Inde y interrompt tous les canaux de télécommunications : réseaux mobiles, internet, haut débit et lignes terrestres.
À ce jour, plus de 500 000 soldats indiens occupent le Kashmir, et la population enfermée n’a toujours pas accès aux réseaux de communication. L’ONU se dit très inquiet par les restrictions actuelles des droits des Kashmiris.

Difficile de résumer en un article soixante-dix ans de conflit. Nous avons choisi de ne pas évoquer le rôle de la Chine qui revendique aussi une partie du territoire, ni de l’impact du retrait des troupes soviétiques d’Afghanistan en 1987, dont certains des moujahidines continuèrent le combat au Kashmir voisin. Le tableau est déjà assez complexe, et la population n’ayant pas accès aux moyens de communication, ni les journalistes au territoire, il est très compliqué à l’heure actuelle de démêler le vrai du faux dans la guerre médiatique que se livrent l’Inde et le Pakistan.
Affaire à suivre…
Merci pour cet article. Oui c’est très difficile de résumer l’histoire de cette partie du monde. De « l’autre côté » du Pakistan, les problèmes de frontières et la continuité des groupes ethniques avec l’Afghanistan sont aussi des sources de conflits…
La colonisation a fait des ravages, la décolonisation aussi et les politiques modernes actuelles ont de forts relents de néo-colonialisme. Je ne sais pas ce qu’on peut faire en tant qu’occidentaux. Se renseigner et partager comme vous le faites ! Merci.